Cours « Gauches, mouvements sociaux et théorie politique », Université populaire de Lyon, 2009

Vous trouverez ici la présentation du cours  » Gauches, mouvements sociaux et théorie politique. Regards croisés entre l’Europe et l’Amérique latine » que j’ai donné avec Matthieu Le Quang dans le cadre du programme 2009-2010 « Passé les bornes, y a plus de limites. Liberté, frontières, infini » de l’Université Populaire de Lyon (Unipop Lyon).


Écouter le cours en podcast

Les enregistrements audio des séances sont disponibles en podcast sur le site de l’Université populaire de Lyon ici: http://unipoplyon.fr/nos-archives/pre-programme-2009-2010/enregistrements-09-10


Intervenants

Thibaut Rioufreyt, Doctorant en science politique à l’IEP de Lyon, Chercheur membre du Laboratoire Triangle et Chargé de cours à l’IEP de Lyon et à l’Université Lumière Lyon2.

Matthieu Le Quang, Doctorant en science politique à l’Institut d’Études Politiques d’Aix en Provence, Chercheur associé à la FLACSO-Sede Ecuador (Facultad Latinoamericana de Ciencias Sociales) et Chargé de cours à l’Université Lumière Lyon 2 et à l’IEP de Lyon.


Présentation du cours

Ce cours est né de discussions entre deux spécialistes de terrains très différents : d’un côté, l’Amérique latine et, plus précisément le mouvement indigène en Équateur et, de l’autre, le Parti socialiste en France et le Parti travailliste au Royaume-Unie. L’élaboration d’une discussion entre ces deux champs d’étude est donc une prise de risque, risque de la comparaison sauvage sur des éléments hétérogènes, risque de cohabitation de problèmes et de méthodes très différents, risque de cloisonnement entre une réflexion théorique, autour de concepts et de textes savants, et une étude de terrain, empirique et ethnographique. Ces champs d’étude restent relativement cloisonnés au sein de la science politique française. Si nous avons choisi de prendre ce risque-là, c’est précisément parce qu’il nous semble que le regard croisé peut nous permettre en ciblant des thématiques spécifiques de dépasser des frontières, géographiques et culturelles bien sûr mais également des frontières disciplinaires et scientifiques.

Nous proposons donc de faire un cours à deux voix qui serait un voyage permanent entre l’Europe (et plus particulièrement la France et la Grande-Bretagne) et l’Amérique latine (avec un focus spécifique sur l’Équateur, la Bolivie, le Mexique et le Guatemala) mais aussi entre la théorie politique et l’étude empirique. L’objectif est de montrer que la théorie politique et l’histoire des idées essentiellement développée en Europe ou aux États-Unis peut aider à expliquer des processus politiques actuels en Amérique latine mais aussi que les expériences mises en place par les gouvernements de gauche et certains mouvements sociaux en Amérique latine pourraient servir à rénover les programmes politiques de la gauche européenne. Pour cela, nous proposons de nous pencher sur les deux thématiques suivantes.


PROGRAMME DES SÉANCES


PREMIÈRE PARTIE: PRÉSENT PERPÉTUEL NÉO-LIBÉRAL ET MOUVEMENTS INDIGÈNES

Nous entamerons une discussion autour d’un texte de Jérôme Baschet, historien médiéviste qui s’est intéressé au néo-zapatisme mexicain (BASCHET Jérôme, « L’histoire face au présent perpétuel. Quelques remarques sur la relation passé/futur », in HARTOG François & REVEL Jacques (dir.), Les Usages politiques du passé, Éditions de l’EHESS, 2001, pp. 55-74). Il voit en ce dernier une expérience qui, par son rapport au passé, permet de lutter contre le « présent perpétuel » néo-libéral. Il nous semble intéressant de tester l’hypothèse selon laquelle on pourrait trouver dans l’expérience des mouvements indigènes, des formes de résistance à la logique du présentisme (il n’y a plus que le présent, forme de mouvement, de progrès sans contenu au nom duquel on fait des réformes néo-libérales).

Sans prétendre trouver des alternatives au présent perpétuel qui enferme la gauche dans une forme de conservatisme (résistance à la gauche de la gauche, soumission chez les sociaux-libéraux) en s’inspirant d’expériences étrangères qu’il suffirait d’importer, celles-ci nous permettent d’une part, de penser les limites de la réflexion au sein de la gauche européenne et, d’autre part, d’envisager de penser un autre possible.


SÉANCE 1 : PRÉSENT PERPÉTUEL ET MOUVEMENTS INDIGÈNES (16 novembre 2009)

I) Le présentisme et ses effets

1) Le présentisme chez François Hartog

2) Le présent perpétuel chez Jérôme Baschet

3) Présent perpétuel et gauche européenne

II) Une forme de résistance au présentisme : les mouvements indigènes

1) Le temps indigène

2) La relation des indigènes avec la terre

3) L’organisation sociale du politique


SÉANCE 2 : NÉO-LIBÉRALISME ET MOUVEMENTS INDIGÈNES (23 novembre 2009)

I) Ce que je sais sur lui. Quelques réflexions sur le néo-libéralisme

1) Retrait de l’État et dépolitisation de l’action publique

a) Marchandisation de l’action publique et retrait de l’État de certains domaines d’intervention

b) Une dépolitisation de l’action publique

2) L’émergence de nouvelles formes d’intervention étatiques

a) Révolution bureaucratique et société de marché

b) New Public Management et inspectabilité du social

II) Les communautés indigènes face aux politiques néo-libérales

1) Les conséquences des politiques néo-libérales sur les communautés indigènes

a) Terres et territoires

b) La privatisation des ressources naturelles

2) Un cas exemplaire : Le Plan Puebla Panamá

a) Le Plan Puebla Panamá

b) Mobilisations contre le projet


DEUXIÈME PARTIE : LES RAPPORTS ENTRE ORGANISATION POLITIQUE ET MOUVEMENT SOCIAL

Dans cette seconde partie, il nous semble intéressant d’analyser un problème que pointe la sociologie des mouvements sociaux : l’institutionnalisation des mouvements sociaux et leurs difficultés à se transformer en parti politique. Pour cela, nous partirons du mouvement indigène équatorien qui est un exemple type de la difficulté des mouvements sociaux à se transformer en partis politiques en agissant dans le cadre politique établi avec pour objectif de le réformer de l’intérieur, tout en gardant une capacité de mobilisation sociale pour contester ce système politique. Le maintien de ces répertoires (actions conventionnelles de négociation et actions non conventionnelles de contestation) est de plus en plus difficile au fur et à mesure que le mouvement s’institutionnalise et occupe des charges politiques importantes.

Cela sera une base de départ à une discussion sur les rapports entre organisation et mouvement, c’est-à-dire deux modes de structuration du politique (1) et entre social et politique, c’est-à-dire deux modes de conception du politique (2). Cela nous permettra de relier les réflexions de théoriciens politiques comme Marx sur cette question et les conséquences de ces rapports sur l’état de la gauche française en les voyant sous un autre angle grâce au regard étranger, à la fois culturellement et scientifiquement, des études sur les mouvements indigènes en Amérique latine.


SÉANCE 3 : RELATIONS ENTRE MOUVEMENTS SOCIAUX ET ORGANISATIONS POLITIQUES (1) (30 novembre 2009)

I) Penser les gauches à partir du couple mouvements sociaux/organisations politiques

1) Gauche sociale et gauche politique

a) Lutte socio-économique et lutte politique chez Marx

b) Mouvement ouvrier et mouvement socialiste

2) Organisation et mouvement : gauche institutionnelle et gauche mouvementiste

a) La gauche institutionnelle

b) La gauche mouvementiste

II) Du mouvement social au parti politique : analyse d’une transformation

1) Clauss Offe et la difficile transformation des mouvements sociaux en partis politiques

2) Le cas du mouvement Pachakutik


SÉANCE 4 : RELATIONS ENTRE MOUVEMENTS SOCIAUX ET ORGANISATIONS POLITIQUES (2) (07 décembre 2009)

I) L’ambivalence de la représentation : la figure du porte-parole

1) Autonomie ou soumission des dominés ?

2) La position sociale de l’intellectuel

II) Être au pouvoir et le critiquer, un équilibre difficile mais nécessaire

1) Participer au pouvoir et rester un mouvement social : le cas du mouvement indigène dans le canton de Saquisili

2) Comment rester critique quand la gauche est au pouvoir ? L’exemple des relations entre le gouvernement de Correa et les mouvements sociaux en Équateur


SÉANCE 5 : LA TRADUCTION INTERNATIONALE DES IDÉES ET DES PRATIQUES : POSSIBILITÉS DE TRANSFORMATION POUR LES GAUCHES EUROPÉENNES ? (14 décembre 2009)

I) Crise intellectuelle de la gauche européenne

1) Professionnalisation et désintellectualisation

a) L’émergence de la figure de l’expert

b) Le poids croissant des élus locaux

2) La production intellectuelle extra-partisane

a) L’externalisation de la production intellectuelle

b) Les mouvements sociaux comme laboratoire d’idées

II) Mouvements indigènes : entre local et international

1) La transnationalisation de l’action collective

a) Théories sur la transnationalisation des mouvements sociaux dans un monde globalisé

b) Forces et limites de ces mouvements

2) Mobilisations contre le Plan Puebla Panamá

a) Répertoires d’action

b) Critiques, revendications et stratégies du mouvement contre le PPP


Vous pouvez également télécharger le syllabus du cours en format PDF ici: Syllabus_Cours_Unipop_Lyon_ 2009


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Cours « Gauches, mouvements sociaux et théorie politique », Université populaire de Lyon, 2009 de Thibaut Rioufreyt et Matthieu Le Quang est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’Utilisation Commerciale – Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International.

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